Sabato, 24 Marzo 2012 21:07

Abraham - L’alliance avec l’Unique (Virginie Larousse)

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En répondant à l'appel divin de quitter sa terre, la demeure de son père, ses racines, Abraham manifeste une foi et une confiance totale en Yahvé. Homme en marche, il incarne, pour la Bible, la figure universelle du juste, du sage, en qui l'humanité a trouvé un père.

 

Dossier: Abraham le patriarche - Sa vie

L’alliance avec l’Unique

«Yahvé dit à Abram:  "Quitte ton pays, ta parente et la maison de ton père, pour le pays que je t'indiquerai. Je ferai de toi un grand peuple, je te bénirai, je magnifierai ton nom; sois une bénédiction! [...] Par toi se béniront tous les clans de la terre"» (Genèse 12,1-3). Lorsque le patriarche biblique reçoit la parole de Dieu pour la première fois, il ne s'appelle pas encore Abraham, mais Abram - dont la traduction littérale est «le Père est élevé».
C'est plus tard, dans la Genèse (17,5), que Yahvé modifiera profondément la signification de son nom: par l'ajout d'une simple lettre - le «shei», l'Eternel fait d'Abraham le «père d'une multitude de nations» et parachève son alliance avec le patriarche.
Étape ultime d'une mutation d'identité dont l'acte fondateur est précisément l'injonction divine lancée à Abram le Chaldéen de quitter sa terre. Originaire d'Ur, dans le sud de la Mésopotamie (actuelle Iraq), il avait suivi son père Térah plus au nord, à Harân. La région, si l'on en croit la tradition biblique, est un cloaque pour l'humanité: souillée par le culte rendu à d'innombrables idoles, hypnotisée par des souverains mégalomanes tels le mythique Nemrod (Genèse 8), dominée par l'arrogante Tour de Babel, cette civilisation ne peut que susciter l'aversion de Yahvé.

Une épreuve d'une rare violence

En intimant à son serviteur de quitter cette terre, fût-elle indigne, Dieu soumet cependant Abram à une épreuve d'une rare violence. Il ne lui demande rien moins que de renoncer à son passé, à sa demeure, à ses racines. De se mettre en marche vers un pays dont il ne mentionne même pas le nom. Et ce sacrifice, c'est à un vieillard âgé de 75 ans qu'il l'impose ! Au crépuscule de sa vie, Abram est invité à devenir un autre. Tout cela en échange de quoi? De la promesse que sa postérité - non lui - possédera cette terre. Postérité? Yahvé n'est pas sans ignorer qu'Abram et sa femme Saraï sont stériles (Genèse 11,30). Pourtant, si cet engagement a de quoi laisser perplexe, le vieil homme ne pose aucune question à son Dieu. Empli d'une foi et d'une confiance infinie en Yahvé, il s'exécute sans mot dire. Il tourne le dos aux sirènes de Babel et se met en marche, vers une terre qui appartient à d'autres hommes - les Cananéens - et qu'en tout état de cause, il ne possédera jamais en propre.
Ce faisant, Abram ne manifeste pas seulement son extrême obéissance à l'Éternel, il témoigne également d'une étonnante témérité. Après tout, il aurait pu, comme le prophète Jonas, se rebeller, tenter de fuir le destin qui se dessinait à lui. Rien de tout cela. «Abram prit sa femme Sarai; son neveu Loth, tout l'avoir qu'ils avaient amassé et le personnel qu'ils avaient acquis à Harân,. ils se mirent en route» (Genèse 12,4-5). C'est un fragment d'humanité qu'Abram, tel Noé dans son arche, emmène avec lui vers cette Terre promise appelée à devenir le berceau d'une humanité nouvelle. Et c'est sain et sauf que le clan arrive dans la contrée fertile de Canaan. Dans ce monde, Abram le déraciné est désormais un étranger.
Qu'importe. Ses vraies racines ne puisent pas dans un lieu, mais dans la foi en Yahvé, à qui il érige aussitôt un autel. En revanche, il ne se lance pas dans la construction d'une maison destinée aux siens: bientôt, il devra reprendre la route, vers le Néguev, puis, à cause d'une famine, vers l'Égypte (Genèse 12,9-10).
Tour au long du récit de la Genèse, Abraham apparaît comme un homme perpétuellement en marche. Envers et contre tout, il poursuit son chemin, surpasse les coups durs. C'est peut-être pour cette raison que la Bible accole à son nom, pour la première fois, l'adjectif d'ivri, «hébreu» (Genèse 14, 13). L’Hébreu, c'est celui qui est «de l'autre côté», le «passeur» (1).
Dans une civilisation polythéiste, lui n'a foi qu'en l'Unique. Abraham prêche la culture de l'altérité. Difficile de ne pas voir dans la vie du patriarche la préfiguration de l'Exode sous la conduite de Moïse, mais aussi des multiples exils que connaîtra le peuple juif au cours de l'histoire - en particulier celui que subirent les descendants d'Abraham au VIe siècle avant notre ère, dans une direction strictement inverse, après le sac de Jérusalem par Nabuchodonosor II.

Le Dieu des Hébreux et des Arabes

Mais Abraham n'est pas qu'une incarnation avant l'heure du «Juif errant». Car ce sont «tous les clans de la Tèrre» qui seront bénis grâce aux mérites d'Abraham le juste, non sa seule descendance, dit la Genèse. En lui, l'humanité entière a trouvé un père. Installé dans un pays qui n'est pas le sien, le vieil homme cohabite en harmonie avec ses habitants originels. Il ne cherche pas la confrontation, ne revendique aucun droit de propriété en vertu de son alliance avec Dieu. Abraham le sage sait composer avec l'Autre. D'ailleurs, Yahvé n'est pas présenté uniquement comme le Dieu des Hébreux (Genèse 16) : il est aussi celui des Arabes par le biais d'Ismaël, fils que le patriarche concevra avec sa servante égyptienne. Ce message universaliste tranche fortement avec les Livres de l'Exode et le Deutéronome, dans lesquels les relations entre Israël et les autres peuples sont marquées par une grande hostilité. L’identité du patriarche est double, comme l'est son nom: il est Abram, le premier père du peuple hébreu, et Abraham, dont la vocation est universelle. Figure de dialogue et d'ouverture, Abraham deviendra naturellement l'ancêtre commun des Juifs, des chrétiens et des musulmans. Mais par-delà les religions monothéistes, l'histoire d'Abraham peut résonner en tout un chacun. Car au fond, sa vie ressemble à une métaphore de la condition humaine. L’homme n'est que de passage sur Terre. Sa vie est éphémère.
A l'image d'Abraham, l'homme marche perpétuellement vers l'inconnu: celui de sa propre finitude.

Virginie Larousse

1) L’étimologie du mot fait débat. D’autres chercheurs estiment qu’il pourrait dériver d’Éber, un des descendants di Noé.

(Le monde des religions, n. 45, p. 20)

 

Letto 3310 volte Ultima modifica il Giovedì, 10 Maggio 2012 09:49
Fausto Ferrari

Religioso Marista
Area Formazione ed Area Ecumene; Rubriche Dialoghi, Conoscere l'Ebraismo, Schegge, Input

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